[Tacoma] Camping Paradise

- Ouais, grommela-t-il, essayant néanmoins de garder bonne figure tant que sa fille était dans les parages. Cette dernière triturer d'ailleurs un vieil ourson qui n'était pas de première fraicheur mais ne disait rien, suivant docilement son père.

Ils revenaient par le même sentier qui avait conduit John à la cabane champêtre des Davis. Ils croisèrent un jogueur matinal qui ne leur prêta qu'une attention modérée se caractérisant par un simple coup d’œil. Les abords du camping approchaient et finalement, sur les deux cents derniers mètres, alors qu'ils passaient près d'une caravane de haut standing, ils furent interpellés par un cri hystérique.

John ne mit pas longtemps à voir d'où venait ce hurlement de jouvencelle. Un grand roux à l'allure fluette et aux manières guindées, approcha des trois jeunes gens en faisant de grands gestes maniérés.

- Mon Dieu, Mon Dieu, mes choux ! Comme c'est trop mignon ! Il avait la voix qui partait dans les aigus par moment. J'ai toujours rêvé d'adopter une petite fille mais Loyd ne veut pas en entendre parler ! Il se tourna vers la caravane : LOYYYYYDDDD !!! hurla-t-il à en fendre un verre.

A peine le temps de respirer qu'il reporta son attention sur les deux hommes et sur la petite fille, à la vitesse de l'éclair.

- Mon Dieu... C'est pas trop dur sans une maman ?

Davis faisait des efforts pour ne pas mettre une droite à l'autre énergumène, et un mouvement dans la périphérie visuelle du privé lui fit remarquer que des policiers se dirigeaient vers le sentier. Le rouquin n'ayant rien remarqué lui, proposa naturellement :

- J'aimerai tellement que vous rencontriez Loyd pour lui montrer à quel point c'est formidable pour deux hommes d'élever un enfant... Ce qu'il est vieux jeu, Mon Dieu.

Et d'un petit geste d'inviter les compères à le suivre dans sa caravane. Davis ne semblait pas partant le moins du monde, mais il n'avait pas remarqué les agents en uniforme qui arrivaient.

- Vous allez voir, mon Loyd fait le meilleur café de toute la côte Ouest !
- Mais on a pas le temps... grommela un Davis bougon, jusqu'à ce qu'il puisse voir les officiers qui approchaient petit à petit. Mais bon, je peux bien en toucher un mot à votre homme ouais.
- Dommage que la petite ne puisse pas rentrer deux minutes.... Le rouquin semblait vraiment déçu. Et la petite de renchérir :
- Mais papa, moi aussi je veux du café !
- C'est pas encore de ton âge Izzie. Aller, tu vas à la mer avec papi et mamie.
- On t'attend dans la voiture p'pa.

Davis de hocher de la tête avant de pousser avec une certaine vigueur le rouquin vers sa caravane, lequel frétillait d'impatience malgré la déception manifeste de voir la petite Izzie s'envoler sans que son Loyd ne l'aperçoive. La caravane avala les deux hommes.

- C'est vrai on va à la mer ?! Cool !

John pouvait constater qu'elle avait des étoiles dans les yeux. Quand les officiers passèrent à côté d'eux, ils ne firent pas attention à la fille qui accompagnait John, lequel ne ressemblait pas à Davis, ce qui expliquait surement qu'ils n'en avaient rien à foutre d'un père et de sa môme. Et pourtant s'ils avaient bien regardé. Enfin, tant pis pour eux.

Les parents de Davis, et accessoirement, les grands parents de la fillette, reçurent le PI avec des questions pleins les yeux. Les policiers que John avait croisé semblaient être les seuls dans le coin. Davis paternel s'exprima le premier à ce sujet.

- On a bien fait comme vous avez dit. Seulement, semblerait que votre copain se soit mit à bavarder à votre sujet et au sujet de notre fiston. Du coup ils sont revenus, mais le gros de la cavalerie ne va pas tarder.

Il laissa plâner le suspens un moment comme-ci une équipe du SWAT allait transpercer les fenêtres en sautant en rappel depuis le toit du camping car, ce qui ne manquerait pas d'être folklorique cela dit. La matrone ne pu retenir quelques questions :

- Est-ce qu'il va bien ? Vous n'allez pas lui faire de mal n'est-ce pas ?

Si elle savait qu'il était entrain d'expliquer les joies de l'homoparentalité à d'illustres inconnus dans le camping... D'ailleurs, il ne fallait pas qu'il se laisse emporter... La petite écoutait les adultes discuter, avant de tirer la manche de sa mamie en insistant.

- C'est quand qu'on part à la mer ??! Mamiiiiiieeee, c'est quand qu'on part ?!

- D'accord. Je suppose que c'est inévitable.

La mère renifla bruyamment tandis que la petite continuait son manège. Est-ce qu'elle ne voulait pas entendre que son papa allait aller en prison histoire de se protéger inconsciemment, ou est-ce que la plage était bien plus importante que tout le reste ? Dur à dire.

Les Davis grands parents et petite fille laissèrent John s'en aller sans faire d'autres histoires. Ce dernier retrouva Davis fils en compagnie du rouquin, et de celui qui devait être Loyd, un homme d'une quarantaine d'année, avec une calvitie sur le point de se déclarer, des petites lunettes assorties à sa petite taille, et un air de fouine.

Le boxeur était confortablement assis dans un sofa vieille époque entrain de siroter un café fumant. Il faisait la conversation allègrement avec les deux bonhommes, toute animosité envolée. A l'intervention de John, il descendit sa tasse d'une traite avant de se lever.

- 'scusez messieurs, mais nous avons à faire maintenant que la petite est avec ses grands parents.

La fouine observa Davis avant de déclarer.

- Plus je vous observe et plus j'ai l'impression de vous connaître.
- Une ancienne conquête à toi Loyd ? Tu vas me rendre jaloux !
- Arrête tes simagrées un petit peu !
- Moi, des simagrées ? Moi Monsieur ?
- Oui, je peux pas parler deux minutes à un homme sans que tu fasses ta petite crise !

La scène de ménage était bien partie pour durer et Davis tenta bien de saluer les deux compères avant de partir, c'était peine perdue. Il emboita donc le pas de John pour sortir de la caravane.

- Pourquoi tu ne me livres pas directement à eux ? Je comprends pas... Je croyais qu'on devait se rendre ?

Il afficha une mine perplexe en suivant John quand soudainement, le cri hystérique du copain au rouquin, le fameux Loyd, donna le ton de la séquence suivante :

- C'EST LE GARS DE LA TELE QUI A KIDNAPPE SA FILLE !

Au moins tout le camping était au courant maintenant, tout en donnant un John une diversion pour ne pas répondre à Davis concernant la prime qu'il comptait récupérer. D'ailleurs, ce dernier lâcha quelques mots :

- J'savais que j'aurai du le cogner c'pd !
- IL EST LAAAAAAAAA !!

Et Loyd de faire de grands signes de mains à l'attention des badauds. Les flics qui étaient passés il y a peu risquaient fort bien de revenir voir ce qu'il se passait.

Heureusement pour les deux compères, les deux homosexuels jouissaient d'une certaine réputation et dans les caravanes encore endormies, quelques jurons fusèrent à leur intention, leur disant de manière plus ou moins fleurie de la fermer. Quelques personnes regardèrent les deux hommes passer sans rien tenter de particulier. De là à savoir ce qu'ils pensaient exactement.

John retrouva rapidement la sortie et il put constater que sa voiture était toujours là, et qu'elle trônait seule dans la rue, sans âmes qui vivent aux alentours. Davis poussa un sifflement admirateur devant l'engin. N'oublions pas qu'il conduisait une Torino rose.

John approcha de sa voiture, l’œil aux aguets, mais il ne vit rien de suspect dans cette rue. Finalement, il monta dans sa voiture et entreprit de récupérer un Davis jouant les chiens de prairies en essayant de zyeuter alentours s'il y avait quelque chose de suspect.

- Il y a tant de monde que ça à mon cul ? ironisa-t-il en bouclant sa ceinture.

Et c'était parti pour le palais de justice afin de remettre le boxeur en cavale à la justice.