[Center] Mont de piété Novi Pazar

Ils repartaient en sens inverse, remontant vers le nord comme au début de la journée. Sally ne s'attendait pas à ce genre d'aventures pour une première, mais fallait croire qu'à Seattle, on vous mettait dans le bain directement. Enfin bon elle doutait fortement que se faire prendre en otage était une constante dans le coin, surtout pour un flic. Elle se demandait bien comment Al s'était d'emmerdé pour se faire avoir. Qu'importe.

Le bonhomme baissa son arme, et le fait de ne plus avoir le canon sur sa tête soulagea fortement Sally. Le trou d'entrée de la balle était généralement propre, et selon le type de munition, le trou de sortie l'était un peu moins. Elle n'avait pas envie que ses parents se rendent à la morgue pour observer son visage complètement défiguré. Au moins là, elle garderait ses traits intacts si l'avocat souhaitait en finir avec elle.

Tout en essayant de capter son regard dans les rétroviseurs, Sally entreprit de répondre, faisant preuve d'empathie, sans tomber dans la pitié :

- A Hawaï... ça ne doit pas être facile à vivre. Ils s’appellent comment vos enfants ?

Sally essayait de la jouer fine en s'intéressant à sa vie, en l'obligeant à réfléchir et penser, à sortir de l'émotion. Il fallait qu'elle montre qu'elle entendait ce qu'il disait et qu'elle comprenait, qu'elle s’intéressait à sa situation.

Sally avait du mal à savoir s'ils arrivaient bientôt ou pas, mais dans ce genre de situation, le temps défilait bien trop vite, malgré la sensation désagréable de cet homme derrière elle, l'arme en suspens, son souffle chaud dans la nuque, l'ambiance dans la voiture.

- Oui j'ai un enfant, Billy il s'appelle. Il aura bientôt cinq ans.

Une petite pensée pour le petit. S'il advenait qu'elle y passe, ce gosse aura connu plus de décès dans sa courte vie que n'importe quel enfant de son âge. Enfin normalement. Sally essaya de rebondir sur les questions de l'avocat :

- Ca ne vous plairait pas d'aller à Hawai ? Ouvrir votre cabinet d'avocat dans ces superbes îles ? Vous seriez proches de vos enfants, expliqua-t-elle sur le ton de la conversation histoire de lui faire envisager d'autres perspectives. Après tout, il ne pouvait pas changer la situation des autres, mais lui pouvait changer sa situation pour qu'elle colle à celle des autres. Et il fallait qu'elle arrive à mettre l'arme sur la table de la discussion. Aussi ajouta-t-elle : Et, Alexander, pourquoi vous avez besoin d'une arme pour aller dire au revoir à vos enfants ?

Le tout était d'espérer que la question ne le braque pas de nouveau alors qu'elle arrivait à avoir un semblant de conversation avec lui.